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La vulnérabilité de l’Afrique aux risques climatiques dans les décennies à venir est à son plus haut niveau, ce qui exige des mesures efficaces et responsables aux niveaux local, national et international1.

Dans un article récent, nous avons demandé aux Africains quels acteurs ils considéraient comme les plus responsables de la lutte contre le changement climatique. Les données de l’Afrobaromètre, rassemblées entre 2021 et 2023, ont interrogé un échantillon de 53 444 personnes dans 39 pays africains pour savoir si elles avaient entendu parler du changement climatique2. Conformément aux enquêtes précédentes menées dans la région3, la probabilité d’avoir entendu parler du changement climatique est plus élevée parmi ceux qui ont un niveau d’éducation formelle, accès accru à l’information, des ressources et une conscience de la sécheresse que d’autres. Le niveau de connaissance de ce concept est plus haut pour les hommes que des femmes.

Opinion des citoyens sur la responsabilité pour action climatique

Près de la moitié (45%) des 26 735 personnes interrogées qui ont entendu parler du changement climatique estiment qu’en première lieu, leur propre gouvernement est responsable de la lutte contre le changement climatique et de la réduction de ses effets. Les 30% suivants attribuent la responsabilité principale au grand public africain. En comparaison, les émetteurs historiques sont les moins souvent cités comme responsables, notamment les pays riches (13%) et les entreprises et l’industrie (8%).

Les répondants d’Afrique de l’Ouest se distinguent par la proportion la plus élevée d’opinions selon lesquelles leur propre gouvernement est responsable du changement climatique. Ceux d’Ouganda, du Bénin, d’Éthiopie, du Ghana et du Kenya se répartissent de manière relativement égale entre la responsabilité principale du gouvernement et celle du public.

L’accès à l’éducation et aux médias modifie les perceptions de la responsabilité climatique. Les personnes plus scolarisées ou qui utilisent régulièrement les réseaux sociaux sont plus susceptibles de condamner les pays riches et les industries que leurs propres gouvernements.

La confiance dans le gouvernement est également importante. Lorsque les citoyens considèrent leur gouvernement comme efficace et moins corrompu, ils ont confiance et croient que les citoyens et l’état peuvent agir contre le changement climatique. Mais la corruption affaiblit ce sentiment de responsabilité partagée. Ces résultats signalent un cercle vertueux dans lequel le professionnalisme de l’état donne aux citoyens les moyens d’agir et de tenir leur gouvernement responsable de ses actions.

Implications pour la responsabilité

Il est inquiétant que beaucoup de citoyens africains les plus vulnérables au changement climatique, se sentent également les plus responsables de la lutte contre ce phénomène, surtout lorsqu’ils ne bénéficient pas du soutien de leur gouvernement. Lorsque la corruption est élevée et que les services publics sont faibles, les citoyens sont moins enclins à attendre de leurs dirigeants des mesures critiques en faveur du climat, d’où la nécessité d’une action combinée et de l’implication des gouvernements et des émetteurs historiques.

À mesure que de plus en plus de citoyens ressentent les effets du changement climatique, ont accès à l’éducation et à l’information et commencent à comprendre les enjeux, ils sont plus enclins à exiger des comptes de la part de leur gouvernement.

Cela signifie que les acteurs politiques et, plus largement, les parties prenantes de la gouvernance climatique devront accorder une plus grande attention à l’action climatique, car les citoyens subissent les effets du changement climatique, en comprennent les conséquences et cherchent de plus en plus à demander des comptes à leurs représentants et à leurs gouvernements.

Il faut qu’on mette ces conclusions dans une perspective mondiale qui montre que 89% des personnes interrogées dans 125 pays souhaitent que leur gouvernement national fasse davantage pour lutter contre le changement climatique3. Cette analyse suggère que les citoyens qui ont accès aux ressources et à l’information sont généralement favorables à l’action climatique, à l’autonomisation des Africains dans leur vie quotidienne et à la reconnaissance du rôle plus important que les émetteurs historiques devraient jouer dans l’action climatique.